Sortie prévue le 21 novembre 2025.
Adapter Terrifier en jeu vidéo n’avait rien d’évident. La saga de Damien Leone s’est imposée comme une référence du cinéma gore contemporain grâce à une esthétique radicale, une violence frontale et un ton oscillant entre cynisme et grotesque. Autant dire l’opposé de ce que l’on associe habituellement à l’arcade rétro et à ses codes colorés, rythmés et presque innocents.
C’était donc un pari risqué. Peut-être même un pari perdu d’avance. Et pourtant, Terrifier : The ARTcade Game réussit quelque chose d’assez rare : proposer une adaptation fidèle à l’esprit du film, tout en revendiquant une identité vidéoludique forte. Après une démo d’une trentaine de minutes sur Nintendo Switch, un constat s’impose, le jeu va plus loin que ce que son concept laissait imaginer. Il n’est pas parfait, mais il intrigue, il bouscule, et surtout, il montre une véritable vision créative.
Art the Clown en pixel art : l’icône déformée mais intacte

La première question que l’on se pose en lançant la démo est simple : comment transposer Art the Clown dans un style pixelisé sans le rendre ridicule ? Le personnage repose beaucoup sur sa présence physique, son sourire figé, son regard vide et la froideur clinique de ses gestes. On pouvait craindre une version « mignonne » involontaire, voire une perte d’intensité.
Il n’en est rien. Le pixel art, loin d’adoucir le personnage, le stylise jusqu’à en faire une silhouette presque fantomatique. Les sprites d’Art sont d’une fluidité surprenante, avec des animations qui rappellent autant l’expressivité du cinéma que les classiques de l’arcade. Il bondit, esquisse des mouvements brusques, tourne sur lui-même pour porter un coup, et chaque action est ponctuée d’un sourire figé qui semble gravé dans la rétine.
Le reste de la direction artistique confirme cette ambition. Les décors sentent la crasse, la moisissure, les néons qui n’éclairent plus vraiment. Ruelles humides, parkings souterrains, bâtiments décrépis : chaque environnement semble tiré de l’univers de Terrifier, mais filtré par un prisme rétro qui ne gomme jamais la noirceur du matériau d’origine. Le pixel art n’est pas utilisé comme un prétexte nostalgique, mais comme un outil pour amplifier l’identité visuelle du film.
Le sang occupe une place centrale. Non pas en tant qu’effet gratuit, mais comme signature graphique. Les gerbes écarlates suivent des trajectoires presque chorégraphiées, les éclaboussures restent au sol comme des stigmates, et certains finishers reproduisent des moments-clés des films tout en adoptant une esthétique 16 bits assumée. Dans le meilleur des cas, le jeu réussit à rendre la violence presque… belle. Une manière de rappeler que Terrifier n’est pas qu’un film gore : c’est un spectacle d’excès.
Un beat’em up viscéral, pensé pour le défouloir

Sur le plan du gameplay, Terrifier : The ARTcade Game revient aux fondamentaux du beat’em up : on avance, on éclate des crânes, on ramasse des armes improvisées et l’on affronte des vagues d’ennemis jusqu’au prochain écran. C’est simple, direct, efficace. Le plaisir naît de la répétition maîtrisée.
Les coups de base sont rapides, la prise en main immédiate, et chaque arme apporte une nuance dans le rythme des attaques : la batte cloutée ralentit légèrement Art mais confère des impacts lourds et satisfaisants, le scalpel est rapide mais moins puissant, la tronçonneuse transforme l’action en une mêlée incontrôlable où l’écran se remplit de particules sanguinolentes. Le jeu ne cherche jamais à devenir technique, mais il demeure suffisamment nerveux pour maintenir l’attention.
La vraie surprise, c’est le mode coop local, accessible dès la démo. À plusieurs, le jeu change d’échelle. L’action devient frénétique, les déplacements se synchronisent presque malgré soi et les éclats de rire s’invitent rapidement dans la partie. Le gore devient un langage partagé, un prétexte à la surenchère plutôt qu’un outil d’effroi. C’est ici que l’hommage au rétro prend tout son sens, Terrifier : The ARTcade Game ne cherche pas seulement à imiter les jeux d’arcade, il veut retrouver la dynamique sociale qui les définissait.
La bande-son rock synthwave contribue également à cette montée d’adrénaline. Ses nappes saturées, ses basses sales et ses pulsations lentes instaurent une ambiance qui oscille entre tension et malaise. C’est le genre de musique qui semble tout droit sorti d’un cauchemar cinématographique des années 80, une esthétique parfaitement en phase avec le projet.
Une adaptation fidèle, sans compromis

S’il fallait résumer la philosophie du jeu, un mot suffirait : fidélité. Là où d’autres adaptations se tordent pour plaire à un public plus large ou pour éviter toute controverse, The ARTcade Game assume pleinement sa nature extrême. Le ton oscille sans cesse entre l’humour noir et l’horreur graphique, comme dans les films. Le grotesque n’est jamais dissocié du malaise. Cet équilibre est fragile, mais la démo montre qu’il est possible de le maintenir.
Le jeu ne cherche pas à faire peur. Il cherche à imposer une ambiance. Et cette ambiance doit beaucoup à la manière dont l’univers de Terrifier est interprété, non pas comme un ensemble de scènes gore, mais comme un monde où la violence est un langage esthétique. Le pixel art devient une manière de reconstruire cet univers sans jamais le trahir.
Cette fidélité s’exprime aussi dans le rythme. Certaines zones de la démo laissent volontairement respirer l’action, comme si le jeu imitait les silences pesants des films. On sent que les développeurs aiment la licence, mais surtout qu’ils la comprennent. Le jeu ne tombe jamais dans l’auto-parodie, ni dans la surenchère bête et méchante. Il s’inscrit dans la continuité du matériau d’origine.
Une démo prometteuse, mais encore fragile

Techniquement, tout n’est pas encore au point. Sur Switch, la démo montre des chutes de framerate dès que l’écran se remplit d’ennemis ou d’effets visuels. Les collisions manquent parfois de précision, donnant l’impression que certains coups ne touchent pas véritablement. Dans un beat’em up, cette micro-seconde de sensation manquée peut suffire à briser le rythme.
Le jeu souffre également d’une lisibilité parfois limitée, en particulier en mode portable. L’abondance d’effets (particules, éclairs, giclées de sang) peut saturer l’écran et rendre l’action plus brouillonne que prévu. Rien de dramatique, mais un point à ajuster.
Ces défauts ne remettent pas en question la proposition, mais ils rappellent que le jeu a encore besoin d’un polissage léger avant sa sortie. L’essentiel est là : une vision claire, une direction artistique forte, un gameplay qui trouve sa place. Maintenant, il faut consolider l’ensemble.
Verdict provisoire : un ovni rétro-horrifique à surveiller

Après une demi-heure en compagnie d’Art the Clown, le constat est simple, Terrifier : The ARTcade Game a quelque chose. Une identité. Une audace. Une manière assumée de marier deux univers qui n’auraient pas dû cohabiter (le rétro arcade et le gore contemporain) et d’en tirer une proposition cohérente, presque naturelle. Le jeu n’essaie pas de plaire à tout le monde, mais il séduit par la force de sa vision.
Si la version définitive affine la jouabilité et stabilise ses performances, il pourrait bien devenir l’une des curiosités vidéoludiques les plus marquantes de cette fin d’année. Pas seulement pour les fans de Terrifier, mais pour tous ceux qui aiment les projets qui osent dévier de la norme.
Et une chose est certaine : même en 16 bits, Art the Clown n’a rien perdu de sa puissance d’attraction. Il continue de sourire. Il continue de déranger. Et il pourrait bien, paradoxalement, être au cœur de l’un des jeux rétro les plus surprenants de 2025.
Fiche technique
• Titre : Terrifier : The ARTcade Game
• Développeur : Relevo
• Plateformes : Playstation 5, Nintendo Switch, PC, Xbox Series X/S.
• Sortie : 21 novembre 2025
• Genre : Beat’them up



